La situation des familles divorcées ou séparées ayant opté pour la garde alternée de leurs enfants interpelle dès lors qu’il est question du partage des allocations familiales. Pourtant, le nombre de familles monoparentales recensées aujourd'hui dans notre pays (1,76 million de familles), et l'augmentation constante du mode de garde alternée auraient pu justifier une intervention législative plus tôt.
Quoi qu’il en soit, la difficulté réside dans le principe de l’unicité de l’allocataire qui interdit de reconnaître la qualité d'allocataire aux deux parents, en même temps et au titre du même enfant.
Alors que le code civil a autorisé le recours à la résidence alternée comme modalité d'exercice en commun de l'autorité parentale, le droit de la sécurité sociale affirme toujours le principe de l'unicité de l'allocataire des prestations familiales.
L’article L 513-1 du Code de sécurité sociale dispose
« Les prestations familiales sont, sous réserve des règles particulières à chaque prestation, dues à la personne physique qui assume la charge effective et permanente de l'enfant.) »
Et ’article R 513-1 du Code de sécurité sociale dispose :
« La personne physique à qui est reconnu le droit aux prestations familiales a la qualité d'allocataire. Sous réserve des dispositions de l'article R. 521-2, ce droit n'est reconnu qu'à une personne au titre d'un même enfant.
Lorsque les deux membres d'un couple assument à leur foyer la charge effective et permanente de l'enfant, l'allocataire est celui d'entre eux qu'ils désignent d'un commun accord. Ce droit d'option peut être exercé à tout moment. L'option ne peut être remise en cause qu'au bout d'un an, sauf changement de situation. Si ce droit d'option n'est pas exercé, l'allocataire est l'épouse ou la concubine.
En cas de divorce, de séparation de droit ou de fait des époux ou de cessation de la vie commune des concubins, et si l'un et l'autre ont la charge effective et permanente de l'enfant, l'allocataire est celui des membres du couple au foyer duquel vit l'enfant. »
L’enfant devrait obligatoirement donc être rattaché à l’un ou à l’autre parent, désigné comme allocataire unique. Seul ce parent devrait bénéficier de la totalité des prestations familiales relative à l’enfant – le partage n’étant autorisé que dans le cadre des prestations familiales soumises à une condition de ressource (ex : complément familial, allocation de rentrée scolaire, allocation de base de la prestation d'accueil du jeune enfant, allocation de logement familiale, etc.)
Une telle position est discutable.
C’est la raison pour laquelle dans un arrêt du Conseil d’Etat du 21 juillet 2017, le Conseil d’Etat a considéré qu'aux termes du deuxième alinéa de l'article L. 521-2 du code de la sécurité sociale :
" En cas de résidence alternée de l'enfant au domicile de chacun des parents telle que prévue à l'article 373-2-9 du code civil, mise en œuvre de manière effective, (...) la charge de l'enfant pour le calcul des allocations familiales est partagée par moitié entre les deux parents soit sur demande conjointe des parents, soit si les parents sont en désaccord sur la désignation de l'allocataire " ; qu'il résulte de ces dispositions que les enfants en situation de résidence alternée sont pris en compte pour le calcul des allocations familiales ; qu'ainsi, le ministre n'est pas fondé à soutenir qu'un " principe d'unicité de l'allocataire " s'opposerait à la prise en compte de ces enfants pour la détermination du montant de l'aide personnalisée au logement ;"
Dorénavant, les enfants en situation de garde alternée doivent être regardés comme vivant habituellement au foyer de chacun de leurs deux parents et être pris en compte pour le calcul des aides familiales sauf accord contraire entre les parents ou mention contraire dans une décision du juge judiciaire.
Cette solution nous semble juste !
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